l’activité du chien

En attendant que les éleveurs nous créent des races de chien inactifs, qui ne bougent pas, on va supposer que les chiens ont besoin d’activité. Comme nous. Combien de temps seriez vous capable de rester sans rien faire (sans télé, ni radio, ni journal, ni livre, ni jeu de carte, ni ordinateur…) à la maison, sans sortir plus d’une demi heure, sans faire les courses, sans voir des amis… En fait, combien de temps seriez-vous – serions-nous – capables d’imiter ce que nous demandons à nos chiens ?” Joël Dehasse

La question est posée, et bien posée.

Ma réponse intuitive : pas très longtemps…

La réponse un peu plus scientifique nous est donnée par les résultats surprenants d’une étude américaine réalisé en 2012… en réalité, l’inactivité physique serait responsable de 10% des décès mondiaux. Soit autant que la mortalité liée au tabac. (Sources: Dr I-Min Lee, et al. Effect of physical inactivity on major non-communicable diseases worldwide : an analysis of burden of disease. The lancet. Vol 380 No 9838 pp 219-229. 21/07/2012.)

D’accord, mais c’est quoi le rapport avec le chien ?

Je m’explique : aujourd’hui, il devient de plus en plus fréquent de croiser des chiens avec des troubles du comportement plus ou moins sévères.

Anxiété, agressivité, destruction, vocalises…le tout à des degrés divers plus ou moins supportables.

Seulement, il y a encore 30 ans, peu de chiens avaient besoin de consulter un comportementaliste… d’ailleurs le métier de comportementaliste est né il y a pile 30 ans (Le métier de comportementaliste, en tant que spécialiste de la relation entre l’homme et le chien, a été créé en 1986 par l’éthologiste Michel Chanton (http://www.michel-chanton-ethologiste.com/)

Mais alors, que s’est-il donc passé en 30 ans pour que la situation se dégrade tant ?

Rien, il ne s’est rien passé… et c’est bien là le souci. De chien de garde/chasse/sécurité et j’en passe, le chien est devenu “de compagnie”. Voilà.

 

Alors oui c’est chouette un chien de compagnie, il nous tient compagnie. On le gratouille, on le papouille… et on le laisse à la maison seul des heures parce que parfois on pas besoin de sa compagnie. Et quand on rentre du boulot, on est fatigué, alors se promener… pfiou…. “surtout que ce soir, tu vois Benji, il pleut, alors on va se mouiller hein ! T’aime pas la pluie hein dit”

Alors Benji, il est pas contrariant… Il va faire pipi sur le 1er lampadaire, arrêter de renifler parcequ’il entends bien votre énervement face à ce comportement désagréable sous pluie… “Aller benji ! dépêche ! Je me mouille moi !”

Bon… après 10 minutes interminables, Benji a enfin fait sa petite commission, ouf ! au sec !

A peine à la maison, Benji va commencer a s’exciter, à vouloir jouer, à vous taquiner… Mais “Ca suffit Benji ! Panier ! j’ai le repas/le ménage/envie de regarder la télé au calme…”

Alors Benji… il va commencer a ronger un truc… pas de bol : vos chaussures ! il va commencer à guetter et aboyer au moindre bruit (d’ailleurs, à ce sujet… vous venez de découvrir un petit mot pas doux du tout de vos voisins… Benji aboit beaucoup apparemment)

Et là : vous allez prendre contact avec un comportementaliste.

Bon…

A votre avis ? Benji est-il fou ?

 

Je ne crois pas… Benji souffre de manque d’activité. Benji est laissé seul 10h par jour. Il est promené 20 minutes le matin, parfois 15 a midi, parfois pas du tout car vous n’avez pas eu le temps de revenir (“désolé Benji… le boulot tu peux pas comprendre”) et souvent pas plus que 30 minutes le soir… et encore, quand il fait beau. Et vu que c’est l’automne…

Au total, Benji sera sorti moins de 1h dans la journée. Il ne vous aura vu que 5h pendant lesquelles vous ne vous serez pas vraiment occupé de lui (ah non désolée : la nuit ne compte pas en temps de présence. pas de triche !) et aura été seul 18h (ah bah là si, on compte la nuit. De toute façon, Benji, il dort dans la cuisine, ca évite qu’il fasse pipi partout)…

C’est beaucoup. Beaucoup trop. Alors forcément, Benji, il est pas fatigué et il enchaine les “bêtises” (comprendre : des activités canines tout à fait normales pour un chien mais que peu de maitres apprécient), il devient de plus en plus sensible et réactif. Et du coup… bah vous pensez qu’il a un souci comportemental.

Et pour cause ! Le manque d’exercice est l’une des causes à l’origine des problèmes d’hyperactivité, de destructions, d’aboiements excessifs, ou encore d’agressivité.

zuma renifle

Pour résumer Benji a juste besoin d’activités…

Et l’activité pour un chien c’est :

2 heures de sortie, avec possibilité de renifler (parce que renifler est un exercice essentiel pour le chien. Je dédierais un article sur ce point), avec possibilité de courir, de jouer, de rencontrer des congénères, d’avoir un vrai moment de relation avec vous…

Mais ce n’est pas tout…

compte mitsy

calin trio

Il a aussi besoin de 7h de présence (pas la nuit on a dit ! ça compte pas) avec vous, ou avec des congénères. C’est à dire des moments où vous lui adresserez un petit mot, lui ferez une caresse, prendrez une fois sa balle…lui montrerez qu’il est présent. Il n’a pas besoin de 7h de papouilles ! mais il a besoin de savoir qu’il est présent pour vous.

et… de 2 a 3h d’activités diverses (ronger, observer, chercher, travail d’éducation,apprentissages divers, creuser, aboyer, jouer…)

 

Et promis… si votre chien a tout ça (Je sais… c’est du boulot d’avoir un chien), un bon nombre de ses “troubles du comportement” disparaitront.

Et c’est avec une joie incroyable qu’il vous dira “bonne nuit”

dodo mitsy

Attention : tous les troubles du comportement ne sont pas liés à un manque d’activité ! De nombreuses autres causes peuvent entrainer hyperactivité, destructions, vocalises ou agressivité. Si votre chien présente des soucis, prenez contact avec un professionnel qui saura vous guider au mieux.

Troubles du comportement : retour en arrière

Médor est un chien peureux. Fido est réactif avec ses congénères. Loulou est ultra protecteur avec ses jouets…

Bien entendu, vous travaillez avec lui pour dépasser ces troubles. Et vous avez déjà pu observer de beaux progrès ! Ce n’est pas sans fierté que vous regardez Médor se promener en ville sans trembler… c’est avec une joie immense que vous croisez un congénère sans que Fido ne se jette sur lui tous crocs dehors. Quand à Loulou, il vous rends maintenant sa balle sans grogner et ce sont des heures de jeux !

Mais voilà… un jour : Médor refuse d’avancer… Fido se déchaine… Loulou grogne dès que vous approchez la main de sa balle.

Pourquoi ? ça allait tellement bien depuis quelques semaines !

Rassurez vous : c’est normal… Tout comme nous, lorsque nous devons changer un comportement lié à une émotion, nous connaissons des retours en arrière. C’est normal.

Rien ne sert de chercher la cause : peut-être (sans doute) avons nous brûlé une étape par excès d’enthousiasme. Peut-être votre compagnon a-t-il vécu une mauvaise expérience sans que vous ne le sachiez.

Ainsi, Médor se sera peut-être effrayé d’un bruit nouveau qui ne vous a pas alerté ? Fido aura croisé un congénère réactif malgré son calme ? Loulou se sera fait prendre sa balle alors qu’il ne désirait plus jouer ?

Ces retours en arrière, s’ils nous inquiètent toujours, ne sont pas graves, à condition de ne pas les négliger. Tout ce que le chien a appris reste appris. Il va juste falloir corriger un peu les choses et revenir nous aussi en arrière. Cela permettra d’une part de redonner confiance au chien, de ne plus le mettre en échec, mais aussi de mieux consolider ce qui a déjà été appris.

Plutôt que de regarder le retour en arrière du comportement comme un échec, voyons le comme une chance de faire encore mieux. Souvent ces péjorations du comportement ne durent que peu de temps et sont suivi d’une amélioration supérieure à ce que l’on connaissait avant.

Bien entendu, ces phases sont à prendre au sérieux et sont a travailler immédiatement. l ne faudrait pas que le nouveau comportement s’installe. Et bien entendu, les méthodes de désensibilisation et de renforcement positifs sont à privilégier.

Lors d’un trouble du comportement, un seul mot d’ordre : patience et respect.

La patience et le respect du rythme de notre chien sont les clés du succès à long terme.

Le chien de l’éducateur

Ah… les chiens de l’éducateur canin.

On l’imagine beaux, grands, forts, obéissant toujours, jamais en faute, toujours parfait…

Oh oui… le chien de l’éducateur. C’est celui dont on rêve tous !

Un peu comme les enfants des professeurs : toujours premiers de la classe et bien élevés qui disent bonjour à la dame et font jamais de bêtises.

Hein quoi ? c’est pas vrai ? les enfants de professeur sont des enfants comme les autres ? qui font des bêtises, sont parfois impertinent et parfois nuls à l’école ?

Bah en fait… le chien de l’éducateur, c’est pareil. Même souvent pire… Parce que souvent, les éducateurs récupèrent des chiens avec des vécus très lourds.

Alors cassons le mythe : le chien de l’éducateur. c’est un chien tout ce qui a de plus normal. Avec ses hauts, ses bas… avec ce qu’il aime faire ou pas… avec ses envies de jouer, ses mauvaises humeurs, ses capacités et ses centres d’intérêt.

Ici, les 2 chiens de l’éducateur accompagnent toujours en cours car ils adorent venir… mais un seul travaille. L’autre aime pas ça.

A chacun ses qualités et sa personnalité!

Je le reconnais : je n’ai pas de chien parfait.

 

Mitsy ? il suffit que je lui donne un ordre pour qu’elle refuse d’obéir.

Grave ? non… elle est calme quand elle doit l’être. Elle obéit d’elle-même sans que je n’ai besoin de lui demander quoi que ce soit lors des sorties.

La seule chose qui puisse l’empêcher d’obéir en balade, c’est quand elle joue… je le sais, je m’adapte. Je la laisse jouer, ou pas selon le lieu. et je sais qu’une fois le trop plein d’énergie vidé, tout rentrera en ordre. Je sais aussi qu’elle est très jeune et que ce “détail” se réglera seul dans les prochains mois.

Je n’ai donc aucune raison de la forcer à faire de l’obéissance sur le terrain. Ça ne servirait que à la braquer, et à m’énerver. Nous serions vite dans une impasse !

Mais si ce comportement en repousserait plus d’un, moi, il ne me gêne pas. Elle est libre d’être elle-même.

Je ne me sens pas “en danger” car j’accepte qu’elle exprime sa personnalité. Je pourrais décider qu’elle doit obéir un point c’est tout. Et je pourrais prendre le risque que sa joie de vivre disparaisse, que son obéissance non avouée disparaisse aussi, et perdre cette jolie complicité.

Je n’ai pas envie. Je préfère un chien bien dans ses pattes plutôt qu’un robot.

Zuma… le bosseur. Alors lui c’est l’inverse ! Sur le terrain, il fait envie à tout le monde. Il est PAR-FAIT. Obéissant, apprenant vite… Oui mais…

En dehors du terrain, les choses se gâtent ! Si je peux laisser Mitsy sans laisse la plupart du temps même en ville, Zuma est souvent attaché.

En ville : impossible de le laisser libre. tout l’intéresse et la marche au pied devient une utopie. Les voitures lui semblent un objet tout à fait intéressant au point qu’il n’hésitera pas à traverser la route pour aller en renifler une. Rester sans bouger ? OK sur le terrain, nul part ailleurs… Rester sage au restaurant ? sûrement pas ! trop d’odeurs de nourritures pour son estomac toujours affamé…

Là aussi je m’adapte. il a vécu plusieurs années dans la rue, à pris des habitudes qu’il sera dur de faire disparaitre… c’est comme ça.

Ça ne l’empêche pas d’être un chien super sur plein de points. Je pourrais me fâcher : il serait malheureux et stressé. Et quand il stresse, il est prostré… Je me retrouverais avec un chien sans joie, et cela m’apporterait quoi ? rien…

donc non : les chiens de l’éducateur ne sont pas parfait. Pas toujours. lls ont leurs défauts et surtout leurs qualités. Ils sont eux et pour rien au monde je ne les changerais pour un chien de concours. La compétition canine c’est pas mon truc, ça ne le sera jamais.

Moi mon truc, c’est les chiens. Tous.

Les chiens heureux, bien dans leurs poils, obéissant sans être des machines, avec leur caractère et leur individualité.

Si j’avais voulu autre chose, j’aurais choisi des chiots d’un élevage reconnu, pas des chiens avec des troubles du comportement.

Voilà… les chiens de l’éducateur, ce sont avant tout… des chiens.

calin trio

“Vieux loups, jeunes chiens” (Arte)

Un documentaire d’Arte très intéressant sur le chien, son histoire, sa domestication.

Si le chien et le loup ont des ancêtres communs et sont 2 espèces suffisamment proches pour se reproduire ensemble, et donner naissance à des individus fertiles, leurs similitudes s’arrêtent là. Et c’est déjà beaucoup.

La domestication du loup et sa “transformation” en chien remonte a entre 16000 et 17000 ans. La théorie la plus probable serait que les loups les plus dociles (les moins peureux) se seraient approchés des campements humains afin de manger les détritus. Rapidement, l’humain s’est aperçu de l’intérêt de la chose : le rôle de nettoyeur est d’autant plus apprécié qu’il s’associe à celui de gardien.

En quelques générations seulement : le loup se transforme. Il devient plus petit, son museau se raccourci, son cerveau devient plus petit, les aboiements augmentent et même ses couleurs changent. Le premier chien est né.

La sélection des animaux les plus dociles entrainera alors la grande aventure du chien. Après les plus dociles, seront sélectionnés les meilleurs chasseurs, les meilleurs gardiens… puis des physionomies particulières.

Aujourd’hui, c’est plus de 400 races différentes, des tailles allant de 500g à 100 kg…ayant des aptitudes différentes… on pourrait penser qu’ils n’ont rien à voir les uns avec les autres. Et pourtant !

Tous communiquent de la même façon. Tous ont les mêmes besoins.

Aucun n’a les mêmes fonctions. Chien guide, chien de troupeau, chien militaire ou de police, chien de recherche, chien de chasse, chien de compagnie. Il est partout, il sait tout faire.

 

Et ce qu’il reste du loup ?

Et bien… le chien reste un animal de meute, même si l’on distingue des groupes structurés différemment.

Le loup vit en groupe familial. Ceux que l’on appelait avant les “leader alpha” sont en effet les parents, les adultes reproducteurs. Ils détiennent le pouvoir car ils sont les parents. Ils ne s’imposent pas par la force, les autres membres du groupe les respectent et leur envoie des signaux de soumission. Le groupe est stable, les inconnus n’y sont pas les bienvenus, sauf en période de reproduction.

Le chien vit en groupe aléatoire. Des chiens arrivent, des chiens repartent. chacun est leader a un moment, suiveur à un autre. Les altercations sont souvent plus violentes. La hiérarchie est fluctuante. On parlera plus de codes sociaux a respecter que de structure hiérarchique.

Vieux loups, jeunes chiens : un documentaire de 50 minutes que je vous invite à découvrir.

 

 

 

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